lundi 6 mars 2017

7 conseillers à élire à Luxembourg - ville ?


Les élections communales s’annoncent, les partis politiques peaufinent leurs listes de candidats, finalisent leur programme électoral.
Une campagne de 160 000 euros a été lancée par le gouvernement  pour convaincre davantage de femmes (luxembourgeoises ?)  à se porter candidates.
Une autre campagne - traditionnelle celle-la - consacre 60 000 euros à la motivation des  étrangers non encore inscrits à le faire.
Cette campagne se fait au plan national, sans lien (encore) avec des campagnes au niveau communal.

Regardons de plus près le cas de la capitale. Début 2017 les 33 302 Luxembourgeois y représentent 29 % des résidents et 86,6 % des électeurs.
Au moment de fixer au siècle passé le nombre de conseillers communaux selon le nombre d’habitants, celui - ci correspondait grosso modo à l’électorat (luxembourgeois).
Si de nos jours on prenait en compte le nombre d’électeurs pour la composition du conseil communal, il en serait tout autrement non seulement dans la capitale, mais un peu partout dans le Grand- Duché. 
Le 8 octobre prochain il n’y aurait que 7,56  conseillers communaux à élire dans la ville de Luxembourg pour 32 000 électeurs. Alors que la population est passée en 6 ans de 95 058 à 114 090, le pourcentage d’électeurs est descendu de 34 à 28%! La campagne de sensibilisation va le faire grimper sans doute (un peu). Connaissez - vous un ou une responsable politique ayant fait état de sa préoccupation à cet égard?

Et le nation branding?

Un des rares pays à accorder le droit de vote à tous les étrangers - ressortissants d’un Etat - membre de l’UE ou venant d’un pays tiers - et permettant leur élection à tous les postes communaux, y compris celui de bourgmestre, ne serait- ce pas là un argument de vente, un élément du nation branding du Luxembourg? Le résultat n’est pas au rendez - vous avec les scores d’inscription modestes. Nous reviendrons sur de possibles causes, tout en notant que tous les emplois communaux sont - à compétences égales - accessibles à tous les résidents, même sans condition de séjour.

Notons que le faible taux d’inscription ne correspond pas vraiment à l’intégration réussie vantée au fil des discours de dimanche.
Comme le droit de vote est obligatoire au Luxembourg, il n’y a pas lieu de s’inquiéter du taux de participation effective. C’est faire l’impasse sur les étrangers qui boudent le scrutin. Mobiliser cet électorat potentiel constitue un enjeu équivalant à celui des pays sans obligation de vote pour y amener leurs nationaux aux urnes! A voir de près si les campagnes envisagées vont combler le déficit parfois abyssal!

Rares sont les pays à vote obligatoire, d’où une certaine réticence de nombreux étrangers à s’inscrire. Et d’entendre des voix étrangères qui disent qu’ici tout fonctionne bien et en comparaison avec  leur pays d’origine même beaucoup mieux, dès lors pas la peine de s’en mêler!
Des efforts ont été réalisés et les dérogations obtenues par le Luxembourg sont peu à peu tombées (droit de vote actif et passif, période de séjour réduite à 5 ans, inscription non pas 18 mois avant les élections, mais 89 jours) sans pour autant satisfaire à un accès égal à celui des nationaux, comme le stipule Maastricht. Une dérogation est restée: la période de 5 ans de résidence. Elle allait être revue à la baisse selon la volonté de l’immense majorité des députés. A l’initiative des Verts, la Chambre des Députés adoptait le 27 janvier 2011 une résolution introduite par les députés Camille Gira, Fernand Etgen, Gilles Roth, Jean Louis Schiltz, Alex Bodry et AndréHoffmann et votée par tous les députés des partis respectifs. La Chambre « décide à l’issue des élections du 9 octobre 2011, d’analyser le déroulement de ces élections et de rediscuter les dispositions relatives au délai de résidence en vue de le réduire ».
Résultat: rien ne s’est passé!

En Belgique, autre pays à obligation de vote, le résident de l’UE est informé par lettre personnelle qu’il peut voter en renvoyant le formulaire annexé ou online, et ce même s’il est arrivé au royaume il y a quelques jours seulement avant la clôture des inscriptions.

Inscription, vote, choix

Au Luxembourg, le 13 juillet sera le dernier jour pour s’inscrire sur les listes électorales pour les élections communales du 8 octobre à  condition d’avoir 5 années de séjour au Luxembourg et être âgé de18 ans le jour du scrutin. Plus la peine de rassembler les certificats pour prouver la durée de résidence, chaque commune a accès au fichier central qui en fournit les preuves.

Nous voici en pleine campagne pré - électorale en quelque sorte, sans candidats encore, ni programmes.

Comment dès lors convaincre le résident étranger à s’inscrire ?
Depuis quelques mois des multiplicateurs sont formés à cette fin.
Les premiers flyers viennent de sortir. Regardons le flyer national, tiré à 200 000 exemplaires . Sur 0,7 m2 on y voit 10 langues fleurir. Que nous disent -elles? Les formalités d’inscription sont détaillées, 9 domaines de compétences de la commune sont évoqués par des slogans. Malheureusement on n’y distingue pas entre les missions légales et donc obligatoires, comme la fourniture d’eau ou l’aménagement des écoles fondamentales et celles qui relèvent de choix politiques. Le mot « choix » ne figure nulle part, tout comme le mot «logement ». Elire des représentants pour gérer pendant 6 ans la commune, c’est choisir des programmes, des personnes.  Le logement est un vrai souci pour beaucoup d’électeurs - y compris luxembourgeois - et relève de priorités politiques. La commune peut y devenir actif, elle a même droit à de substantielles aides financières de la part de l’Etat. Silence sur des attitudes possibles de la commune par rapport à l’hébergement de réfugiés, sur l’enjeu que peut constituer un plan communal d’intégration. Bouche cousue sur le droit de se porter candidat, sur l’accès aux emplois communaux.
10 langues pour des slogans sur le flyer, dans  combien de langues le futur électeur pourra-t-il accéder à des programmes électoraux?

On réduit les étrangers à des administrés auxquels il faut expliquer non pas les enjeux (qui pourraient les concerner et intéresser) mais le mode d’inscription sur les listes électorales comme s’il s’agissait de s’inscrire - sans internet - pour participer à une conférence.

Chacun se forgera son opinion quant à savoir si ces approches sont autre chose qu’un exercice qui a l’air bien, tout en évitant qu’un nombre significatif, voir tous les étrangers s’inscrivent. Les rares candidats étrangers sur les listes des grands partis illustrent leur faible implantation dans ces milieux. Dès lors le souci des électeurs « obligés » prévaut: il faudra les ménager en leur gardant une position privilégiée dans les emplois communaux, autre terreau électoral. Pour la forme - et « comme l’Europe nous oblige » - on prônera le principe par des campagnes de sensibilisation non concertées, en prenant soin d’éviter des comportements électoraux non connus, ni contrôlables.
Le référendum 20:80 est omniprésent dans tous les esprits.

Pas de surprise donc pour les inscriptions, vues les précautions prises!

serge kollwelter











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