Les élections communales
s’annoncent, les partis politiques peaufinent leurs listes de candidats,
finalisent leur programme électoral.
Une campagne de 160 000 euros a
été lancée par le gouvernement
pour convaincre davantage de femmes (luxembourgeoises ?) à se porter candidates.
Une autre campagne -
traditionnelle celle-la - consacre 60 000 euros à la motivation des étrangers non encore inscrits à le
faire.
Cette campagne se fait au plan
national, sans lien (encore) avec des campagnes au niveau communal.
Regardons de plus près le cas de
la capitale. Début 2017 les 33 302 Luxembourgeois
y représentent 29 % des résidents et 86,6 % des électeurs.
Au moment de fixer au siècle
passé le nombre de conseillers communaux selon le nombre d’habitants, celui -
ci correspondait grosso modo à l’électorat (luxembourgeois).
Si de nos jours on prenait en
compte le nombre d’électeurs pour la composition du conseil communal, il en
serait tout autrement non seulement dans la capitale, mais un peu partout dans
le Grand- Duché.
Le 8 octobre prochain il n’y
aurait que 7,56 conseillers
communaux à élire dans la ville de Luxembourg pour 32 000 électeurs. Alors que
la population est passée en 6 ans de 95 058 à 114 090, le pourcentage
d’électeurs est descendu de 34 à 28%! La
campagne de sensibilisation va le faire grimper sans doute (un peu). Connaissez
- vous un ou une responsable politique ayant fait état de sa préoccupation à
cet égard?
Et le nation branding?
Un des rares pays à accorder le
droit de vote à tous les étrangers - ressortissants d’un Etat - membre de l’UE
ou venant d’un pays tiers - et permettant leur élection à tous les postes
communaux, y compris celui de bourgmestre, ne serait- ce pas là un argument de
vente, un élément du nation branding du Luxembourg? Le résultat n’est pas au
rendez - vous avec les scores d’inscription modestes. Nous reviendrons sur de
possibles causes, tout en notant que tous les emplois communaux sont - à
compétences égales - accessibles à tous les résidents, même sans condition de
séjour.
Notons que le faible taux
d’inscription ne correspond pas vraiment à l’intégration réussie vantée au fil
des discours de dimanche.
Comme le droit de vote est
obligatoire au Luxembourg, il n’y a pas lieu de s’inquiéter du taux de
participation effective. C’est faire l’impasse sur les étrangers qui boudent le
scrutin. Mobiliser cet électorat potentiel constitue un enjeu équivalant à
celui des pays sans obligation de vote pour y amener leurs nationaux aux urnes!
A voir de près si les campagnes envisagées vont combler le déficit parfois
abyssal!
Rares sont les pays à vote
obligatoire, d’où une certaine réticence de nombreux étrangers à s’inscrire. Et
d’entendre des voix étrangères qui disent qu’ici tout fonctionne bien et en
comparaison avec leur pays
d’origine même beaucoup mieux, dès lors pas la peine de s’en mêler!
Des efforts ont été réalisés et
les dérogations obtenues par le Luxembourg sont peu à peu tombées (droit de
vote actif et passif, période de séjour réduite à 5 ans, inscription non pas 18
mois avant les élections, mais 89 jours) sans pour autant satisfaire à un accès
égal à celui des nationaux, comme le stipule Maastricht. Une dérogation est
restée: la période de 5 ans de résidence. Elle allait être revue à la baisse
selon la volonté de l’immense majorité des députés. A l’initiative des Verts,
la Chambre des Députés adoptait le 27 janvier 2011 une résolution introduite
par les députés Camille Gira, Fernand Etgen, Gilles Roth, Jean Louis
Schiltz, Alex Bodry et AndréHoffmann et votée par tous les députés des partis respectifs. La
Chambre « décide à l’issue des élections du
9 octobre 2011, d’analyser le déroulement de ces élections et de rediscuter les
dispositions relatives au délai de résidence en vue de le réduire ».
Résultat: rien ne s’est passé!
En Belgique, autre pays à
obligation de vote, le résident de l’UE est informé par lettre personnelle
qu’il peut voter en renvoyant le formulaire annexé ou online, et ce même s’il
est arrivé au royaume il y a quelques jours seulement avant la clôture des
inscriptions.
Inscription, vote, choix
Au Luxembourg, le 13 juillet sera
le dernier jour pour s’inscrire sur les listes électorales pour les élections
communales du 8 octobre à
condition d’avoir 5 années de séjour au Luxembourg et être âgé de18 ans
le jour du scrutin. Plus la peine de rassembler les certificats pour prouver la
durée de résidence, chaque commune a accès au fichier central qui en fournit
les preuves.
Nous voici en pleine campagne pré
- électorale en quelque sorte, sans candidats encore, ni programmes.
Comment dès lors convaincre le
résident étranger à s’inscrire ?
Depuis quelques mois des
multiplicateurs sont formés à cette fin.
Les premiers flyers viennent de
sortir. Regardons le flyer national, tiré à 200 000 exemplaires . Sur 0,7 m2 on
y voit 10 langues fleurir. Que nous disent -elles? Les formalités d’inscription
sont détaillées, 9 domaines de compétences de la commune sont évoqués par des
slogans. Malheureusement on n’y distingue pas entre les missions légales et
donc obligatoires, comme la fourniture d’eau ou l’aménagement des écoles
fondamentales et celles qui relèvent de choix politiques. Le mot « choix »
ne figure nulle part, tout comme le mot «logement ». Elire des
représentants pour gérer pendant 6 ans la commune, c’est choisir des
programmes, des personnes. Le
logement est un vrai souci pour beaucoup d’électeurs - y compris luxembourgeois
- et relève de priorités politiques. La commune peut y devenir actif, elle a
même droit à de substantielles aides financières de la part de l’Etat. Silence
sur des attitudes possibles de la commune par rapport à l’hébergement de
réfugiés, sur l’enjeu que peut constituer un plan communal d’intégration.
Bouche cousue sur le droit de se porter candidat, sur l’accès aux emplois
communaux.
10 langues pour des slogans sur
le flyer, dans combien de langues
le futur électeur pourra-t-il accéder à des programmes électoraux?
On réduit les étrangers à des
administrés auxquels il faut expliquer non pas les enjeux (qui pourraient les
concerner et intéresser) mais le mode d’inscription sur les listes électorales
comme s’il s’agissait de s’inscrire - sans internet - pour participer à une
conférence.
Chacun se forgera son opinion
quant à savoir si ces approches sont autre chose qu’un exercice qui a l’air
bien, tout en évitant qu’un nombre significatif, voir tous les étrangers
s’inscrivent. Les rares candidats étrangers sur les listes des grands partis
illustrent leur faible implantation dans ces milieux. Dès lors le souci des
électeurs « obligés » prévaut: il faudra les ménager en leur gardant
une position privilégiée dans les emplois communaux, autre terreau électoral. Pour
la forme - et « comme l’Europe nous oblige » - on prônera le principe
par des campagnes de sensibilisation non concertées, en prenant soin d’éviter
des comportements électoraux non connus, ni contrôlables.
Le référendum 20:80 est
omniprésent dans tous les esprits.
Pas de surprise donc pour les
inscriptions, vues les précautions prises!
serge kollwelter
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