(Luxemburger Wort 18 avril 2015)
La
coalition gouvernementale mise en place en automne 2013 voulait
marquer le
coup: sans majorité constitutionnelle il fallait forcer la main
au CSV pour
ouvrir par un référendum consultatif la voie au Awunnerwalrecht
pour les élections législatives.
S’agissait
- il de faire un enfant à l’insu d’un tiers, tout en abandonnant
un consensus
existant ?
La
société luxembourgeoise est friande de consensus, au point que
les programmes
électoraux des partis politiques sont à quelques détails près,
quasiment
interchangeables. La constitution exige une majorité de 2/3 des
députés pour
toute modification. Au cours des travaux parlementaires de
modification de la loi
fondamentale il y avait un consensus sur l’élargissement de
l’électorat. C’est
ainsi qu’en mars 2013 il
y avait accord entre les 4 grands partis politiques pour un
nouvel article 64 avec la formulation suivante: « Une
loi adoptée à la majorité qualifiée peut, dans les conditions
qu’elle
détermine, accorder le droit de vote à des non
Luxembourgeois ». Certes,
cela ne créait aucun automatisme, mais permettait, le moment
venu et sans
changement de la constitution, pareille ouverture. Connaissant
l’opposition (de
la vieille garde) du CSV, le temps n’est pas mûr: autant
attendre et contribuer
à en rapprocher l’échéance.
Mais
le
gouvernement DP- LSAP - Gréng voulait innover le plus vite
possible, non pas en
matière fiscale ou en politique de logement, mais en matière de
participation
politique des résidents étrangers. Le soussigné est depuis un
certain temps
parmi celles et ceux qui estiment que l’exclusion de près de la
moitié de la
population du processus démocratique n’est pas saine, encore
faut- il qu’il y
ait un consensus en la matière. L’accord
de mars 2013 est caduc, en lieu et place la majorité
actuelle demande
par référendum l’opinion des électeurs sur une idée!
Or
depuis que
les 3 partis ont mis au monde cette idée, ils l’ont carrément
délaissée et
abandonnée à ses opposants. Une fois attaquée et amaigrie, le
joli mois de mai
devrait suffire pour l’entourer des uniques et derniers soins!
Pour
finaliser le référendum consultatif (contesté par des experts
estimant qu’il
est plus que consultatif!) on a formulé les questions en 3
langues: en français on parle de résidents non luxembourgeois,
alors qu’en
allemand et luxembourgeois il est question de concitoyens
étrangers
(auslännesch Matbierger). S’il s’agit bel et bien des mêmes
personnes ciblées,
la traduction est loin d’être fidèle! A chacun de juger si ces
formulations non
- identiques témoignent du sérieux de leurs auteurs!
La
Chambre
des Député n’a pas non plus lésé sur les moyens pour organiser
un colloque de
haute volée les 19 et 20 mars sous
le
titre: "Un Nouvel Horizon de la Démocratie ? Le droit de vote
des
étrangers aux élections nationales".
Professeurs
et
chercheurs venus de France, d’Allemagne, du Royaume Uni et de
Nouvelle
Zélande parlaient au Krautmaart devant un parterre d’une
quinzaine d’étudiants,
d’une dizaine de citoyens et de 2 députés (1 « plein temps » en
la
personne de M Kartheiser et 4 autres totalisant un 2e plein
temps, à savoir MM
Bartolomeo, Wiseler, Mosar et Adam). Il s’avère que les députés
y avaient été
invités quelques jours auparavant seulement! Aucun assistant
parlementaire
n’avait trouvé le temps. Gageons que nos élus savent tout et que
les 32 députés
de la majorité seront des propagateurs du OUI auprès des
militants et électeurs
de leur parti. Ils mettaient sans doute à profit ces jours - là
pour préparer
leur campagne et
n’avaient pas
besoin d’arguments supplémentaires.
Le
colloque boudé est une autre illustration du comportement
conséquent des géniteurs triparents délaissant le bébé mal aimé.
Peu
enclins à se mouiller, les responsables ont décidé de réduire la
campagne à son
strict minimum. A moins que dans les coulisses membres et
militants des partis
politiques, des syndicats et autres promoteurs du OUI ne soient
(in-) formés et
mobilisés, même à l’ASTI il n’en a (encore) été rien !
Quelque
soit
le résultat du référendum sur le droit de vote des résidents
étrangers, un
score étriqué laissera des séquelles dans la société. Qui en
sera le
responsable? Le gouvernement a décliné ex ante toute
responsabilité, ne mettant
pas en jeu la sienne! Qui donc? Les électeurs, dont une bonne
partie risque de
répondre à une autre question que celle qui leur aura été posée,
par exemple en
transformant le scrutin en vote de confiance, respectivement de
méfiance envers
le gouvernement?
Rarement
hommes
et femmes politiques n’ont fait courir - les yeux fermés et les
bras
croisés- pareil risque au pays. N’oublions cependant pas qu’un
consensus existe
entre majorité et CSV sur la nécessité de combler le déficit de
légitimité de nos élus, même si les moyens invoqués par les uns
et par les autres
divergent. Une naturalisation facilitée et un droit de vote aux
conditions du
référendum ne sont que des remèdes homéopathiques sur le chemin
de la
reconquête du suffrage universel des résidents.
serge
kollwelter
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