Luxemburger Wort
Donnerstag, den 28. Februar 2013
La nervosité voir des oppositions
farouches que connut le débat sur
le droit de vote communal des
étrangers des années ‘80 semblent
avoir cédé le pas à une approche
plus raisonnée lorsque la perspective
de l’extension du droit de vote
national entre en scène.
Est-ce la conscience croissante
de l’apport essentiel des non-
Luxembourgeois à l’économie, à la
culture et à la démographie du
Grand-Duché?
Est-ce le peu d’effet du vote
communal sur le rapport de force
des partis politiques?
Il ne faut certes pas ignorer
celles et ceux qui se défoulent
dans les réseaux sociaux ou les
forums de discussion sur internet,
même si leur courage ne dépasse
que rarement l’anonymat. Il y a
lieu de porter ce débat dans la
société. N’empêche qu’il semble y
avoir davantage de promoteurs de
cette perspective que jadis! Une
partie du mainstream de la société
préconise une ouverture du scrutin
national aux étrangers, difficile
de les considérer comme des irresponsables.
Au vu des 40 dernières années,
le nombre de Luxembourgeois est
resté stable, celui des résidents
étrangers a doublé. En fait le nombre
de Luxembourgeois n’est resté
stable que par les 1.000 naturalisations
annuelles jusqu'à la réforme
de la loi sur nationalité de 2008.
Cette loi a ouvert de nouvelles
perspectives, admettant enfin la
nationalité multiple et les facilitations
à venir vont sans doute en
augmenter les effets. La naturalisation
comme issue du déficit de
légitimation des élus? Essayons de
distinguer entre une communauté
de destin réunie autour d’une histoire,
d’une langue, d’une culture
et d’un passeport et une communauté
d’intérêts concernée par
leur cadre de vie, la scolarité de
leurs enfants, leur travail et les
décisions politiques qui les influencent.
Un zeste de modernité:
la citoyenneté de résidence
Si l’Etat nation a été longtemps
considéré comme la seule source
possible de la souveraineté, les
choses ont évolué avec la
construction européenne. Il y a 20
ans, le traité de Maastricht a détaché
le droit de vote communal et
européen de la nationalité et l’a
attribué aux ressortissants d’un
Etat membre résidant dans un autre
pays que le sien: la citoyenneté
de résidence faisait ses premiers
pas. Le Luxembourg, comme en
1919 avec l’introduction du droit
de vote des femmes, 26 ans avant
la «patrie des droits de l’Homme»,
est allé plus loin en donnant le
droit de vote actif et passif à tous
les résidents étrangers, issus d’un
Etat membre ou d’un pays tiers.
Cela s’est fait pas à pas, leçon à
retenir peut être: d’abord le droit
de vote actif des citoyens de l’UE,
puis le droit de vote passif, d’une
clause de résidence de douze ans
on est passé à une de cinq, plus
aucune distinction entre ressortissants
de l’UE ou extracommunautaires.
Actuellement ces non-
Luxembourgeois peuvent devenir
bourgmestre et exercer des droits
souverains comme celui d’officier
d’état civil célébrant mariages et
PACs. Ces étapes ont été franchies
dans un très large consensus.
Remontons encore plus loin
dans l’histoire jusqu’à la teaparty
de 1773. Les colons de Boston refusaient
de payer des impôts sans
avoir un mot à dire quant à leur
utilisation: «No taxation without
representation». Ce principe
prend d’autant plus d’ampleur que
le nombre et la part de ceux qui
sont exclus du processus du choix
des décideurs politiques sont importants.
Ce pourcentage n’est
nulle part aussi significatif qu’au
Grand-Duché, à moins de prendre
comme modèle les monarchies du
Golfe!
Cette tenue à l’écart du processus
décisionnel n’est pas seulement
une question de nombre. A
voir de près la pyramide des âges
(ou ce qui en reste) on constate
que l’électorat actuel comprend
une large part de personnes âgées
et inactives, alors que la majorité
des jeunes, faute d’avoir le «bon»
passeport, reste exclue. A qui revient-
il de s’investir pour le long
terme, qui sera concerné par la
couverture des retraites de demain,
de quel groupe d’âge faudrat-
il s’attendre à l’innovation sociale
et à l’adhésion aux valeurs
partagées démocratiquement?
Parmi la population active, parmi
les chefs d’entreprise, parmi les
jeunes les électeurs sont rares...
Un autre pan s’est ouvert au
delà de la souveraineté de jadis
Si nous tenons compte du fait que
de nos jours l’Union européenne
est le principal créateur de droit
puisque 70 % de la législation
luxembourgeoise est d’origine
communautaire, que reste-t-il de
la souveraineté de jadis? A côté du
Conseil des ministres de l’UE, le
Parlement européen est le
deuxième législateur européen.
Une instance transnationale – légitimée
par les électeurs des 27 Etats
membres – a donc une influence
prépondérante sur le corpus législatif
du Luxembourg. Les six membres
du Grand-Duché de ce Parlement
sont par ailleurs choisis par
un électorat comprenant des nonnationaux
devant résider au
Luxembourg depuis deux ans!
Il ne viendrait à l’esprit de personne
de prétendre que nos lois
via les directives européennes
sont imposées par l’étranger ou
des étrangers, même si on doit
reprocher à l’autre législateur européen
une absence totale de
transparence et à la Commission
européenne une quasi-absence de
légitimité démocratique.
Faire des pas vers la participation
de résidents étrangers au
scrutin national et rapprocher celui-
ci du suffrage universel ne met
nullement en question la souveraineté,
puisque celle-ci est déjà très
largement partagée avec des nonnationaux
du Luxembourg et des
centaines de millions de citoyens
de l’UE.
Les débats des dernières semaines
ont ouvert des perspectives
intéressantes. Retenons quelques-
unes. Il serait des plus utiles
que les partis politiques précisent
leur position à l’égard de la participation
des non-nationaux au scrutin
national dans leur programme
pour les élections de juin 2014.
Longtemps le nombre de députés
dépendait du nombre d’habitants,
en 1988 il fut fixé une fois pour
toutes à 60. Si le nombre de députés
était tributaire du nombre
d’électeurs, il n’y aurait que 34
parlementaires à élire.
Et l’intérêt
des intéressés?
La participation des résidents
étrangers aux communales est loin
d’être satisfaisante pour qui envisage
déjà le pas suivant.
Un retour sur l’histoire pourrait
être salutaire. Que ne disait-on à la
fin du XIXe siècle du côté de la
bourgeoisie qui était la seule à
avoir le droit de vote et qui arguait
que les moins fortunés étaient plus
intéressés par un salaire et un
logement décents que par la chose
politique, alors même que c’est
l’entrée des ouvriers dans l’histoire
qui a changé leurs conditions
de travail et de vie. L’argumentation
par rapport à l’intérêt des
femmes pour la politique était de
la même veine. Et si cet intérêt
certifié par les (Luxem-)bourgeois
était dû aux conditions restrictives
et formalités dont sont exempts
les nationaux inscrits d’office sur
les listes électorales? La question
de la soi-disante bonne intégration
des étrangers se pose autrement si
leur intérêt pour la chose publique
est à ce point modeste alors que
leur vie de tous les jours est influencée
largement par les décisions
prises aux niveaux local, national
et européen. Les lignes ne
bougeront sans doute pour de bon
qu’au moment où les partis politiques
auront intégré des étrangers
et ce dans toutes leurs instances.
Fini le temps à ce moment
où on y parlera «des» étrangers,
mais «avec» eux.
L’acquisition de la nationalité
est une autre voie, parallèle. Les
facilitations à venir vont-elles déboucher
sur un droit du sol digne
d’un pays d’immigration et faisant
d’office des nouveaux nés des
Luxembourgeois? Ce chantier ne
peut nous dévier du débat de
l’élargissement de la légitimité de
nos élus! Une forme d’inclusion
des frontaliers viendra elle aussi à
l’ordre du jour. Pays atypique, le
Luxembourg ne peut se référer à
ce qui (ne ) se fait (pas) ailleurs: la
cohésion sociale et l’inclusion sociale
sont des devoirs à domicile à
faire hic et nunc.
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