Les élections aux Etats-Unis sont passées, les observateurs rentrés, le résultat connu[ . Premier bémol en ce qui concerne les résultats : la presse a fait état des scores obtenus par les candidats aux présidentielles et au Congrès. C’est bien là l’essentiel, du moins vu de ce côté-ci de l’Atlantique. L’électeur de la capitale des Etats-Unis aura eu la satisfaction que ce jour-là au moins sa voix a compté au plan national puisque, sans représentant au Sénat et avec seulement un observateur à la Chambre des représentants, il est orphelin au niveau des législateurs. Le 3 novembre, il a aussi élu son conseil communal, qui a une incidence directe sur sa vie. Sur le même bulletin, il avait encore à faire son choix pour la direction scolaire et le délégué de quartier. Dans d’autres Etats, et selon les counties qui les composent, il y a eu encore à choisir des juges, des membres de la direction scolaire et à répondre à plusieurs questions référendaires et ce, en général en deux langues, à Houston même en quatre langues, dont le chinois et le vietnamien.
Ce qui a frappé Josée Lorsché et Gusty Graas, avec qui j’ai pu m’entretenir au retour de leur mission d’observation pour le compte de l’Assemblée parlementaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), et ce à quoi Claude Haagen a acquiescé, c’est la disparité des pratiques selon les Etats. C’est ainsi que les observateurs de l’OSCE, invités par le gouvernement fédéral, ne sont pas admis dans certains Etats, que des citoyens sont rayés des listes électorales pour des infractions mineures, que les candidats des petits partis ou des candidats individuels doivent fournir un nombre d’appuis très variables, sans parler du gerrymandering sur lequel nous reviendrons. Nos parlementaires ont fait des observations le (seul) jour du vote dans la capitale et dans l’Etat voisin du Maryland. Ils ont aimé l’ambiance détendue qui règne dans les bureaux de vote et dans les alentours, tranchant avec l’ambiance respectueuse (Houmass) de mise au Grand-Duché. Même si les cabines n’étaient pas aussi « étanches » qu’au Luxembourg, il y avait des agents officiels fournissant de l’aide et de l’information aux électeurs. Des handicapés pouvaient faire appel à ces agents et des personnes en fauteuil roulant pouvaient utiliser des tables ajustables. L’accessibilité générale pour les handicapés m’a frappé dès mes premières visites aux Etats-Unis dans les années 1970 et 1980, et Michel Pauly l’avait relevé dans un article paru dans le numéro 50 de forum, ce qui nous avait valu un clin d’œil amical de Ferdy Fischer qui ne soupçonnait pas que nous ayons des choses positives à dire des Etats-Unis. Il faut dire qu’à l’époque, le Luxembourg avait de grands retards en la matière. Venons-en maintenant à quelques différences avec les pratiques électorales que nous connaissons chez nous.
A l’extérieur du bureau de vote, il y avait une boîte aux lettres spécifique, où l’électeur pouvait encore déposer son vote par correspondance. Une fois entré, il avait le choix entre un vote sur papier ou par ordinateur. Dans le deuxième cas de figure, il existait encore des variantes selon les Etats : opération digitale pure ou bien impression sur papier de vote, puis numérisation. Autre cas de figure : le provisional ballot. L’électeur remplit respectivement son bulletin ou un bulletin arrivé par la poste qui est mis provisoirement de côté, pour des vérifications à faire pouvant aller jusqu’à une invitation de (re-)venir au bureau de vote avec une pièce d’identité. En 2020, le jour des élections, la moitié des électeurs avait déjà voté, soit par correspondance, soit par early voting. Selon les Etats, un certain nombre de bureaux de vote auront accueilli avant novembre des électeurs pendant plusieurs semaines. A côté des nombreux choix à faire sur un même bulletin, le plus étonnant pour le non-électeur européen se révèle être la ligne write in en bas de chaque choix. Si les paires Trump/Pence et Biden/Harris figuraient évidemment sur tous les bulletins, ce n’était pas le cas dans tous les Etats pour Jorgensen/Cohen, Segal/de Graf et Hawkins/Walker. Mais l’électeur pouvait encore faire un choix personnel par write in. Dans les bureaux de vote, il n’y a pas eu d’observateurs nationaux, contrairement aux centres de tabulation où les votes étaient comptabilisés. Dans ces derniers, nos observateurs n’ont pas pu s’y rendre, leur mission était terminée. Quelques observateurs de longue durée de l’OSCE ont pu s’y mêler aux très nombreux observateurs nationaux. Dès lors, il n’est pas possible de savoir ce à quoi le write in a pu donner lieu, ni comment les différents thèmes figurant sur le bulletin de vote ont été traités.
Reste la question du gerrymandering, à savoir, selon Wikipédia, « le découpage des districts électoraux de manière à regrouper le nombre de votes de ceux qui sont perçus comme opposants, à l’intérieur d’un nombre restreint de districts où le parti au pouvoir va perdre dans une forte proportion, mais où il va gagner par de petites majorités ailleurs, dans un plus grand nombre de districts ». Un exemple frappant est celui du 6e district du Maryland. Rien à voir évidemment avec nos quatre circonscriptions au Luxembourg en faveur des uns et en défaveur des autres !
Et le projet de loi n° 7325 dont il
était question dans la contribution du forum du mois de novembre ? Ce
projet de loi déposé règlemente la participation d’observateurs choisis
directement par le Luxembourg pour des missions de l’OSCE. La Chambre des
députés est en attente d’un 2e avis du Conseil d’Etat pour pouvoir
poursuivre ses travaux. Le rapporteur espère qu’il en sera ainsi bientôt. Un petit effort
de cohérence à faire dans la campagne du gouvernement pour se faire élire au
Conseil des droits de l’Homme de l’Organisation des Nations unies !
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